Les téléservices publics de santé : un pilotage toujours insuffisant


Cour des comptes
Rapport public annuel 2013 – février 2013
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PRESENTATION

Un téléservice est un système d’information permettant à ses usagers de procéder à des démarches par voie électronique. Dans le domaine de la santé, ces services et leurs usagers sont de plus en plus nombreux. Les enjeux sont considérables, qu’ils concernent les professionnels de santé, les institutions de soins ou les assurés sociaux :

assurer des économies de gestion, rembourser plus vite les assurés, réduire les risques de fraude et optimiser les dépenses ; améliorer les parcours de soins, limiter les effets iatrogènes, voire les « pertes de chances ». La Cour a contrôlé au cours des dernières années certains d’entre eux : les dispositifs publics d’accès en ligne aux dossiers médicaux en 2008, la gestion du dossier médical personnel (DMP) en 2009 par le groupement d’intérêt public qui en est chargé et les systèmes de cartes pour les professionnels de santé (CPS) ou pour les assurés (carte Vitale). Les constats publiés par la Cour ont été assortis de multiples recommandations. Dans le présent chapitre, elle a cherché à apprécier les suites qui avaient pu leur être apportées et, plus généralement, à faire le point sur l’évolution des téléservices publics de santé. Une forte dynamique est constatée dans ce secteur (I), dans le cadre d’une gouvernance incertaine (II), avec pour conséquence de nombreux retards ou faiblesses qui nuisent au plein développement de ces téléservices (III).

Résumé des principales recommandations de la Cour (2008-2010)
1. L’ACCÈS EN LIGNE AUX DOSSIERS MÉDICAUX 197
     1. Planifier dans le futur plan d’action un niveau de ressources humaines 
         et financières cohérent avec la stratégie annoncée et son calendrier de mise en oeuvre,
         ainsi qu’avec l’offre industrielle accessible.

     2. Renforcer le rôle et les moyens de coordination de la mission pour l’informatisation du système de santé
         ainsi que des agences régionales de santé (ARS).

     3. Créer une fonction d’expertise nationale et autonome pour la normalisation et les référentiels ;
         réglementer la procédure d’agrément des logiciels d’officine.

     4. Imposer les certificats des cartes Vitale 2 comme partie intégrante du mode d’accès
         à tout service en ligne de données personnelles de santé ; inciter à l’usage de messageries sécurisées
         et pleinement interopérables.

     5. Subordonner les financements à la conformité aux bonnes pratiques informatiques,
         aux cadres nationaux de référence, à une étude économique détaillée, avec indicateurs de performance et évaluation.

2. LA GESTION DU GIP « DOSSIER MÉDICAL PERSONNEL »198
     6. Veiller à la mise en place des services administratifs et comptables du niveau nécessaire au développement des organismes concernés.

3. LES SYSTÈMES DE CARTES DE L’ASSURANCE MALADIE199
     7. Réformer la mission pour l’informatisation du système de santé en en faisant le seul responsable
         de la maîtrise d’ouvrage stratégique des systèmes d’information de santé et de l’assurance maladie.

     8. Stabiliser la stratégie en matière de confidentialité des données médicales.

     9. Fixer à un montant dissuasif et sans autre délai la contribution imposée à partir de 2010
         aux professionnels de santé ne télétransmettant pas les feuilles de soins.

   10. Subordonner les aides financières apportées aux professionnels de santé pour la télétransmission
        au respect de normes strictes de mise à jour des matériels et des logiciels.

I - Une incontestable dynamique

Les téléservices et les outils associés qui avaient été examinés par la Cour ont connu un développement continu.

A - Le développement national des téléservices
1 - Les cartes de sécurisation des téléservices

Deux dispositifs ont été développés depuis plus d’une décennie pour faciliter et sécuriser la gestion des remboursements de l’assurance maladie : la carte Vitale, dont sont dotés tous les assurés, et la carte de professionnel de santé. Conçu pour la facturation, l’ensemble permet au professionnel de santé de sécuriser avec sa carte l’accès au système d’information de l’assurance maladie en authentifiant l’identité du patient avec la carte Vitale de ce dernier et de transmettre aux caisses concernées les feuilles de soins électroniques.

Le groupement d’intérêt économique SESAM Vitale (GIE SV), créé en 1993 par trois régimes d’assurance maladie obligatoire (général, agricole, indépendants) et rejoint par les régimes spéciaux puis par des organismes complémentaires, diffuse une nouvelle version dite Vitale 2 de cette carte électronique d'assurance maladie, qui atteste des droits aux prestations et contient des renseignements nécessaires à leur prise en charge. Cette nouvelle version a été sécurisée plus fortement que précédemment et peut contenir des informations supplémentaires telles que le choix du médecin traitant. La carte Vitale 2 dispose d'une sécurité renforcée et d’une capacité mémoire plus importante, ce qui devait en faire un outil d’identité électronique et d’authentification forte200.

L’abandon de fonctionnalités de la carte Vitale 2

La Cour avait recommandé que les certificats électroniques qu’héberge la carte Vitale sécurisent les accès des usagers à tout service en ligne de données personnelles de santé (la carte de professionnel de santé (CPS) sécurisant, pour sa part, l’accès par les professionnels). Cette voie a été abandonnée en 2010 par les pouvoirs publics et la caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), en invoquant notamment la nécessité d’un lecteur approprié à domicile, comme pour le recours à certaines banques en ligne. Il avait été considéré que le coût d’une telle sécurisation ne serait pas compensé par des économies certaines. La pertinence de ce renoncement reposait notamment sur la perspective d’utiliser la carte nationale d’identité électronique, mais celle-ci exigerait aussi un lecteur individuel pour les assurés et son calendrier de déploiement demeure incertain. L’alternative ainsi envisagée demeure en suspens.

En dépit du coût de l’adjonction de la photographie du titulaire, Vitale 2 n’est donc plus qu’une carte d’identité utilisée seulement pour attester des droits de l’assuré et de son identité pour l’accès au dossier pharmaceutique (DP) et au dossier médical personnel (DMP), sans sécuriser individuellement l’accès à des téléservices. L’investissement ainsi poursuivi en vain représentera plusieurs dizaines de millions d’euros sur la durée de la fabrication de ces certificats électroniques.

La carte de professionnel de santé (CPS) est pour sa part diffusée par le GIP « agence des systèmes d’information partagés de santé » (ASIP Santé). Sa version 3 constitue depuis 2010 une carte d’identité professionnelle électroniquement sécurisée pour les professionnels de santé, avec un code confidentiel. Elle est délivrée sous la responsabilité des ordres des professions de santé, en incluant l’identifiant individuel au répertoire partagé des professionnels de santé (RPPS) et des données telles qu’identité, profession, spécialité, cabinet ou établissement.

Outre la transmission des feuilles de soins électroniques aux organismes d’assurance maladie obligatoires et complémentaires, cette carte permet de créer, d’alimenter et de consulter un dossier médical personnel ou un dossier pharmaceutique. Elle sécurisera prochainement la messagerie des professionnels de santé, la télémédecine ou l’accès en mode sans contact dans des locaux protégés.

Fin 2012, elle était utilisée par 360 000 professionnels de santé libéraux (soit 95 % d’entre eux) et 85 000 hospitaliers (soit 18 % seulement d’entre eux en raison de sa faible utilisation dans leurs établissements). Quelques 300 000 autres cartes sont utilisées par des salariés qui ne sont pas des professionnels de santé, principalement secrétaires médicales et préparateurs en pharmacie.

2 - Les téléservices d’échange entre professionnels et patients

Les téléservices d’échange entre professionnels ou avec les patients visent à optimiser les prises en charge dans le domaine des soins, de la prévention et du dépistage. C’est notamment le cas du dossier médical personnel (DMP), créé pour favoriser la coordination, la qualité et la continuité des soins par la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie. Ce dispositif informatisé gratuit et facultatif, accessible sur internet, a connu de grands retards de développement et n’a été effectivement lancé qu’en 2011. A l’automne 2012, seulement 230 000 dossiers avaient été ouverts.

Le dossier pharmaceutique (DP), ouvert et géré par l’ordre des pharmaciens, connaît une bien plus grande diffusion. C’est un dossier informatique, créé par le pharmacien avec l'accord de son client et consultable dans la quasi-totalité des officines. Il permet de connaître dans quasiment toutes les pharmacies les médicaments délivrés au patient au cours des quatre derniers mois, prescrits par un médecin ou achetés librement par le patient, si ce dernier a donné son accord pour qu’ils y figurent. Chaque pharmacien peut ainsi le prévenir d'éventuels risques de contre-indication. Au 30 septembre 2012, 18 850 000 dossiers étaient actifs, dont le tiers pour des patients de plus de 60 ans. Il y a chaque mois 25 millions de consultations et 51 millions de saisies d’un produit délivré.
Après une expérimentation, une première phase de généralisation de son utilisation en établissement de santé a commencé fin 2012. Cet outil créé en dehors de l’assurance maladie mais financé partiellement par celle-ci est susceptible de la faire bénéficier d’économies dont l’évaluation n’est pas à ce jour engagée.

3 - Les initiatives déployées par l’assurance maladie

L’assurance maladie a entrepris de généraliser l’usage d’internet pour des téléservices utilisés à partir de postes de travail banalisés en le substituant à un système fermé comme l’a jusqu’à maintenant été le dispositif SESAM. A cet effet, la caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) développe depuis 2010 le projet DESIR, pour remplacer progressivement ce dernier et étendre ses propres téléservices. Ces derniers sont déjà utilisés par une partie des professionnels de santé, avec 40 000 utilisateurs enregistrés qui saisissent en temps réel les déclarations de médecin traitant (27 % du total mi-2012), les demandes d’accord préalable, de protocoles de soins de longue durée, d’arrêts de travail et qui accèdent à un historique des remboursements (mis en place depuis 2008 à un coût supérieur à 10 M€, mais fort peu utilisé).

La CNAMTS prévoit d’offrir progressivement des services tels que la prescription électronique de tous les types de prestations, la facturation en ligne des transports sanitaires et celle des soins faisant l’objet de prescriptions électroniques, la dématérialisation des pièces justificatives et de formulaires (avis d’arrêt de travail, déclaration médecin traitant etc.) et leur intégration dans les bases et les processus de traitement de l’assurance maladie. Est également en cours la facturation individuelle des établissements de santé (FIDES), après la consultation des droits des assurés auxquels ils accèdent depuis 2009.

Plus de dix millions d’assurés utilisent par ailleurs désormais le site ameli.fr grâce auquel la CNAMTS offre des services tels que la liste des médecins (par secteur) et leurs principaux tarifs, la consultation des remboursements, la mise à jour ou la déclaration de perte de carte Vitale, la demande d’attestations de droits, de salaire, de relevés d'indemnités journalières, de carte européenne d'assurance maladie.


B - Des développements rapides et diversifiés au niveau local

Le ministère chargé de la santé a incité les agences régionales de santé (ARS) à contribuer aux développements de téléservices sur le terrain. L’objectif est que, dans chaque région, un groupement de coopération sanitaire (GCS) conduise des projets d’intérêt commun et mutualise des moyens (compétences et aides financières), sans constituer d’onéreux pôles techniques.

Pour en assurer le pilotage, le ministère s’est doté en juillet 2012 de spécialistes chargés de définir et de suivre une stratégie et des priorités nationales, au sein de la délégation à la stratégie des systèmes de santé (DSSIS, structure légère de coordination créée fin 2011 avec 15 emplois).
En liaison avec la Cour, celle-ci a procédé à l’inventaire des moyens et des projets régionaux, qui fait apparaître un foisonnement d’initiatives, au risque de doublons et d’incohérences entre régions, comme l’illustre le graphe ci-après.
Source : Délégation à la stratégie des systèmes d'information de santé (DSSIS).

Un foisonnement de projets régionaux

Créés à partir de 2002, les groupements de coopération sanitaire (GCS) en informatisation et téléservices sont passés de 13 en 2008 à 21 en 2012, dont un sous forme de groupement d’intérêt économique (GIE). Fin 2011, 1 146 organismes y adhéraient, soit 66 en moyenne par un groupement de coopération sanitaire contre 37 en 2009 : 451 établissements de santé publics et 309 privés, 189 établissements médico-sociaux, 127 structures fédératives (réseaux, etc.), avec très peu de représentants des professions de santé.

L’agence régionale de santé en est systématiquement membre, mais ne siège que dans quatre cas dans l’instance opérationnelle. Elle n’a signé ou préparé une convention avec le groupement de coopération sanitaire que dans huit cas et le prévoit dans neuf cas. Les effectifs salariés (226) de ces nouveaux maîtres d’ouvrage ont doublé entre 2009 et 2011 comme leurs dépenses (42 M€) financées par l’assurance maladie via les agences régionales de santé (61 %), l’agence des systèmes d’information partagés de santé (26 %), les membres (12 %). Ils géraient fin 2011 un total de 184 projets dans les domaines les plus divers201.

La cohérence de la mise en oeuvre des quelque 184 projets approuvés par les agences régionales de santé appelle une prompte évaluation au regard des contraintes budgétaires de la branche maladie, qui finance directement ou indirectement la presque-totalité de cet ensemble hétérogène. En effet, leur compatibilité interrégionale devra être assurée, aussi bien que leur faisabilité financière : leur aboutissement entraînera des dépenses de fonctionnement dont le financement et l’efficience restent à garantir, en contrepartie d’économies et de gains de performance qu’il conviendra d’évaluer rigoureusement et de dégager effectivement.

Les principaux maîtres d’ouvrage et maîtres d’oeuvre

La caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) est le maître d’ouvrage – pilotage technologique, financement et supervision des prestataires – de l’ensemble des systèmes et téléservices du régime général d’assurance maladie, et gère directement le système de remboursement des prestations. Les organismes d’assurance maladie complémentaire, y compris les mutuelles chargées de gérer des prestations du régime général, sont leurs propres maîtres d’ouvrage, tout en dépendant des données collectées par la CNAMTS pour gérer leurs remboursements complémentaires.
Le GIE SESAM-Vitale est maître d’oeuvre du système de la carte Vitale et de la télétransmission des feuilles de soins. Dans le périmètre des nouveaux services en ligne de l’assurance maladie, il est principalement en charge de la relation avec les éditeurs de logiciels des professionnels de santé et de la sécurisation des échanges par carte.

Le GIP ASIP Santé est le maître d’ouvrage de la carte de professionnel de santé, du répertoire partagé des professionnels de santé (RPPS), du dossier médical personnel, de la messagerie sécurisée unique de santé. Il est à l’origine de plusieurs référentiels d’interopérabilité et d’agrément.
L’ordre des pharmaciens est le maître d’ouvrage de son dossier pharmaceutique et les ordres de professionnels de santé s’organisent pour alimenter le répertoire partagé des professionnels de santé. Les professionnels et les établissements de santé choisissent leurs outils locaux, notamment de facturation à l’assurance maladie. 

II - Une gouvernance problématique

A - Une triple maîtrise d’ouvrage de l’État

Le ministère de la santé a formalisé dans la période récente le développement de trois maîtrises d’ouvrage stratégique202, qui comportent de multiples liens entre elles. Cela a constitué un progrès, mais ces dernières demeurent distinctes et le ministère n’a produit aucun document définissant leurs champs respectifs.

La première et la plus ancienne est celle des systèmes d’information hospitaliers qu’assure la direction générale de l’offre de soins (DGOS) depuis le début des années 2000 au fil des plans de financement de l’investissement hospitalier par l’assurance maladie (directement ou au travers des remboursements d’emprunts) : en dépendent l’utilisation dans les établissements de santé de la carte Vitale, des cartes de professionnels de santé et l’accès aux téléservices que sont le dossier médical personnel et le dossier pharmaceutique.

La deuxième maîtrise d’ouvrage stratégique est celle de la direction de la sécurité sociale (DSS), qui élabore depuis 2010 un projet de schéma directeur stratégique des systèmes d’information de la protection sociale à dix ans, toutes branches réunies, dont dépend normalement le développement à moyen terme des téléservices de l’assurance maladie.

La troisième maîtrise d’ouvrage stratégique est celle de la délégation à la stratégie des systèmes d’information de santé (DSSIS) placée sous l’autorité du secrétaire général du ministère203. Un document d’orientation stratégique en matière de « e-santé » en cours de validation devrait préciser, plus d’un an après la création de cette délégation, le périmètre de ses activités et leur coordination avec les directions de l’administration centrale.

L’unité d’action entre ces trois pôles est assurée plus par les cabinets de ministres successifs, par essence changeants et dont ce ne devrait pas être le rôle, que par une autorité unique et permanente qui aurait pu être la DSSIS. Malgré des participations croisées de la DSSIS et des directions à différentes instances de pilotage des chantiers, le degré de structuration et de mise en cohérence de ces maîtrises d’ouvrage stratégiques n’est pas encore optimal, ainsi que l’administration le reconnaît, en précisant de surcroit qu’elle doit y associer les organismes complémentaires d’assurance maladie.

La DSSIS a mis en place en octobre 2012 une réunion bimestrielle des directions d'administration centrale, de la caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) et de la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), elle-même maître d’ouvrage stratégique dans son secteur. Cette étape est nécessaire mais, dans le passé, des réunions similaires n’ont pas toujours suffi à assurer une coordination suffisamment étroite avec les partenaires d’autres programmes tels que la carte de professionnel de santé ou le dossier médical personnel, comme l’atteste la persistance de difficultés en la matière. En tout état de cause, les outils de conduite technique de ces trois maîtrises d’ouvrage stratégiques ne se rapprochent que de manière variable des normes professionnelles. L’administration centrale n’a au demeurant pas affecté de crédits pour diligenter les audits indépendants qu’elle annonce depuis plusieurs années, alors qu’ils seraient indispensables pour éclairer ses choix et vérifier l’alignement des développements sur la stratégie choisie par elle.

Cette insuffisante cohérence est critiquable notamment au regard des impacts financiers attendus de la télétransmission et des téléservices. Déjà, « la dématérialisation des feuilles de soins dont le taux est passé de 79 % en 2005 à 86 % en 2009 a permis (…) une économie de personnel d’environ 4 000 ETP (soit plus de la moitié de la réduction des effectifs de la branche entre ces deux dates) », chiffre qui atteindrait fin 2012 6 000 ETP204. Des gains importants sont également escomptés à court terme dans la gestion par téléservice des indemnités journalières et des transports sanitaires205 et d’autres suivront à moyen terme. Leur ampleur dépendra notamment du degré de coordination des stratégies, des maîtres d’ouvrage et maîtres d’oeuvre, et de leur évaluation.

Les pouvoirs publics doivent ainsi impérativement se doter d’un pôle stratégique, à même d’assurer un pilotage fort et coordonné des téléservices dans le contexte d’une aussi grande diversité d’acteurs et d’enjeux. La stratégie d’autonomie de la CNAMTS est révélatrice des difficultés auxquelles expose leur faiblesse à cet égard.

B - La stratégie autonome de la CNAMTS

1 - Une nouvelle génération technologique

Pour sa part, la caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) a accéléré la modernisation de ses systèmes d’information, ainsi que la Cour l’avait recommandé206 et que sa convention d’objectifs et de gestion 2010-2013 avec l’État l’a prévu. Son schéma directeur informatique, validé par la direction de la sécurité sociale en 2011, comporte deux importants programmes :

« 1 » (bouquet de téléservices à destination des assurés) et « 2 » (téléservices à destination des professionnels de santé). Leurs objectifs stratégiques sont étroitement liés aux enjeux inscrits dans la convention précitée : renforcer la qualité des soins, réduire le déséquilibre financier de l’assurance maladie, poursuivre l’amélioration de la qualité de service, avec des systèmes d’information réactifs et performants. Une nouvelle génération technologique permettant d’accélérer les traitements des feuilles de soins a été programmée, non plus par lots mais en temps réel ou légèrement différé. Une large palette d’autres services est en développement. Le principe de ce basculement fondé sur l’usage étendu d’Internet et l’évolution vers de nouveaux téléservices sont conformes aux standards technologiques actuels.

Cette dynamique s’accompagne toutefois d’un recul en termes d’organisation et de gouvernance, car la CNAMTS a développé sa stratégie de manière autonome. Même si elle annonce une plateforme « inter-régimes », elle a largement mis les autres régimes devant le fait accompli. Elle a en effet abandonné la prise en commun des décisions de maîtrise d’ouvrage et la mise en commun de la maîtrise d’oeuvre pour lesquelles le GIE SV avait été créé. Elle implante cette nouvelle solution en téléservice uniquement au sein de son propre système d’information.

Depuis 2010, la conception et une partie de la mise en oeuvre de l’infrastructure d’échanges de l’assurance maladie obligatoire avec les professionnels de santé ne relèvent donc plus de l’infrastructure SESAM ni de son cadre stratégique pourtant confirmé en 2008.

Les parties prenantes ont souligné à la Cour qu’elles n’ont pas été associées à la conception de cette nouvelle architecture : le comité de pilotage inter-régimes n’en a été que tenu informé sans que la CNAMTS ait proposé une stratégie conjointe. Or, le succès du dispositif de la carte Vitale et de facturation électronique des feuilles de soins découlait largement d’une gouvernance concertée pendant vingt ans : le conseil de surveillance et le comité directeur du GIE SESAM Vitale ont associé à cet effet les régimes obligatoires et les organismes complémentaires, même si le ministère n’a pas toujours veillé à ce que les stratégies ou les responsabilités soient toujours définies aussi clairement qu’il aurait été souhaitable. La CNAMTS est donc en train de substituer sa propre plateforme de services au dispositif inter-régimes commun existant.

Les régimes obligatoires l’adopteront nécessairement, quoique qu’il n’y ait pas eu de concertation en dehors d’un consensus de principe ;
de nouveaux outils informatiques développés par la CNAMTS sont progressivement mis à leur disposition par elle.

Il n’en va pas de même pour les organismes d’assurance maladie complémentaire207. Les infrastructures techniques communes et les données leur sont indispensables mais chacun d’eux décline ses propres traitements des remboursements complémentaires à ses adhérents. Ils demeuraient fin 2012, plus de deux ans après ce choix déterminant pour plus d’une décennie, dans l’incertitude quant aux modalités de leur accès aux flux des données.
Ce processus modifie profondément le périmètre et les choix stratégiques antérieurs : ainsi, sur demande de CNAMTS, le GIE SESAM Vitale a déjà abandonné en 2010 le système de services en ligne SESAM Vitale qu’il avait développé et ouvert pour traiter les flux de données de téléservices communes à plusieurs régimes. L’investissement correspondant de plusieurs millions d’euros a été effectué en vain.

Les organismes d’assurance maladie complémentaire ont attiré l’attention du ministère, sans effet à ce jour, sur leur dépendance envers la CNAMTS qui découlerait de ce choix, qualifié d’unilatéral208. A l’automne 2012, aucun document de concertation n’avait été encore soumis par cette dernière à ses partenaires en vue d’assurer la concordance des évolutions technologiques.

Ces difficultés sont aggravées par la réalisation de cette nouvelle solution selon une méthode dite « agile »209 que la CNAMTS reconnaît appliquer « brique par brique » sans visibilité excédant dix-huit mois. La stratégie à long terme est claire, mais les étapes techniques et opérationnelles à moyen terme restent à préciser, afin que les organismes partenaires disposent d’une visibilité sur la trajectoire à mettre en oeuvre par eux pour atteindre la cible.

Le conseil de surveillance de SESAM Vitale avait, à l’automne 2012, été réuni trois fois seulement depuis 2007. Il a été mis devant le fait accompli. Le comité directeur du GIE a bien été informé de la nouvelle stratégie de la CNAMTS, mais sans pouvoir peser sur les choix.

L’accord-cadre inter-régimes sur lequel restera fondée la télétransmission des feuilles de soins et l’émission des cartes Vitale jusqu’à la mise en service du nouveau dispositif, au-delà de 2016, est ainsi de facto vidé de l’essentiel de sa substance. Ce recul va à l’encontre des préconisations de la Cour qui visaient notamment à renforcer la coordination des acteurs et la cohérence des stratégies poursuivies.

2 - L’impuissance du ministère

La caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) n’a guère réagi aux initiatives prises par le ministère et les autres régimes pour que le futur téléservice bénéficie de la pérennité de la gouvernance inter-régimes. Dans une lettre du 11 juillet 2011 approuvant le schéma directeur informatique de la CNAMTS, le ministère avait demandé à celle-ci de « préciser la nouvelle gouvernance de ce programme qui permettra d’associer tous ces partenaires à la bonne marche de ce programme». En l’absence de réponse, les représentants des organismes d’assurance maladie complémentaire ont exprimé au ministre de la santé en février 2012 leur profond désaccord avec cette situation.

Leur courrier n’a reçu de réponse que sous forme d’une réunion cinq mois plus tard, où le désaccord a été confirmé. Une lettre du 5 juin 2012 du ministère rappelant cette obligation à la CNAMTS, puis une réunion en juillet 2012, restaient sans davantage de suite, quatre mois plus tard, autre que la perspective d’une nouvelle réunion. La ministre chargée de la santé souligne que la gouvernance inter-régimes et l’association de l’assurance complémentaire devront être précisées et stabilisées en 2013.

Toutefois, début 2013, aucun document de concertation n’avait été encore soumis par la CNAMTS à ses partenaires en vue d’assurer la concordance des évolutions technologiques.

3 - La pérennité du GIE SESAM-Vitale

En tout état de cause, même dépourvu d’un partage inter-régimes des objectifs et des développements dont il a la charge, y compris en matière de sécurité des données, le GIE maître d’oeuvre doit le maintenir en vie. Il en assure la maintenance (l’ensemble SESAM-Vitale coûte quelque 30 M€ par an, nouvelles cartes comprises), mais la CNAMTS a interrompu en 2010 la modernisation du système alors que la phase de transition avec la nouvelle architecture n’a pas encore été définie. Or, alors que doivent être garanties la continuité et l’évolutivité des services informatiques en place, un problème transitoire précédera le remplacement intégral de SESAM par les téléservices que la CNAMTS annonce, sans date précisément fixée, vers 2017-2020. Les professionnels doivent d’ici là continuer à disposer des modules logiciels actuellement en service, et qui ont été conçus selon le savoir-faire d’une époque révolue.

La CNAMTS est consciente du risque d’une inadaptation progressive et dangereuse pour la continuité du traitement par les régimes d’assurance maladie obligatoires des 1,3 milliard de feuilles de soins gérées par ces derniers comme de la partie des feuilles de soins également prise en charge par les organismes d’assurance maladie complémentaire.

Le GIE prévoit dans son plan d’actions d’assurer les évolutions nécessaires. La CNAMTS indique avoir renforcé les missions du groupement à cet effet pour garantir l’intégration des téléservices qu’elle développe dans les logiciels pour professionnels de santé fournis par les éditeurs.

Si des progrès ont été accomplis ces dernières années, des mesures fortes doivent être prises pour assurer la cohérence des choix d’investissement et les arbitrages nécessaires ne sauraient être plus longuement éludés. D’une part, la convergence des trois maîtrises d’ouvrage stratégiques exercées par le ministère devrait être renforcée en unifiant leur pilotage (au sein du secrétariat général). D’autre part, dans l’intérêt des assurés, le ministère doit, ainsi qu’il en exprime la volonté, restaurer avec fermeté et sans tarder une gouvernance inter-régimes de la conception et du déploiement des téléservices de facturation des soins et veiller à la sécurité de la transition de SESAM Vitale vers ces derniers.

III - De nombreux développements à améliorer

A - Le déploiement du dossier médical personnel

Après une longue phase de recherches, d’expérimentations régionales et de développements infructueux lancée en 2005, ce système de dossiers individuels est accessible nationalement sur internet depuis 2011. Il permet de grouper les données de suivi du patient : traitements, analyses, antécédents médicaux et chirurgicaux, comptes-rendus hospitaliers, radiologies, prévention. Deux ans après le déploiement selon une technologie enfin stabilisée, l’État n’avait cependant pas encore publié le décret définissant le champ du dossier médical personnel (DMP), dans l’attente, en accord avec la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), de disposer de suffisamment d’éléments d’appréciation du fonctionnement du dispositif.

Fin 2012, quelque 260 000 DMP avaient été ouverts, à un rythme quotidien d’un millier de créations et de deux mille dépôts de document mais sans que l’on puisse à ce stade se prononcer sur l’efficience du dispositif, faute notamment d’un volume suffisant de documents saisis et d’un ciblage sur des sites pilote et sur des populations prioritaires (par exemple malades en affections de longue durée), ce qui aurait facilité l’appréciation de son apport.

La gestion du dossier médical personnel par le GIP ASIP Santé

Issu de la fusion fin 2009 des GIP CPS (carte de professionnel de santé) et DMP (dossier médical personnel), le GIP ASIP Santé (agence des systèmes d’information partagés de santé) a généralisé l’utilisation de la carte de professionnel de santé CPS 3, conjointement avec la mise en oeuvre à partir de 2010 du répertoire partagé des professionnels de santé (RPPS), crée par une loi de 2004. Cette fusion a permis des économies d’échelle, ainsi que le renforcement, recommandé par la Cour, des services administratifs et comptables du GIP. Ce dernier a cependant été contraint d’évoluer avec une faible visibilité luriannuelle, car la signature d’un contrat d’objectif et de performance pluriannuel avec l’État et la branche maladie a été reportée d’année en année, contrairement aux recommandations de la Cour et des rapports successivement diligentés par le ministère avant 2009.

Un contrat 2013-2015 est une fois de plus annoncé comme imminent.

La Cour a observé en tout état de cause une diminution des ressources humaines affectées au dossier médical personnel par l’agence des systèmes d’information partagés de santé alors qu’il conviendrait à l’inverse de concentrer les efforts pour rentabiliser l’investissement.

Le coût total de développement du dossier médical personnel a été d’au moins 210 M€ entre la loi de 2004 l’ayant instauré et fin 2011. Le quart environ en a été dépensé en expérimentations, sans lendemain mais qui ont néanmoins permis de clarifier certains problèmes juridiques, organisationnels et techniques. Le coût d’autres téléservices de santé, complémentaires et qui ont vocation à être interopérables avec le dossier médical personnel (DMP), est à prendre aussi en compte, tels que le dossier pharmaceutique (26 M€ de coûts directs à fin 2012, dont 4 M€ compris dans les 210 M€ précités), le dossier communicant cancer et les dossiers de patients informatisés.

Les dossiers de patients informatisés (DPI)

L’assurance maladie a financé non seulement les 210 M€ du DMP, mais, indépendamment de cet effort, la direction générale de l’offre de soins a logiquement mis également à sa charge le développement dans les établissements de santé de systèmes de dossiers de patients informatisés. Elle n’en connait que partiellement le coût total, qui dépassera à terme de plusieurs fois le montant ci-dessus, mais elle a utilement incité à leur interopérabilité avec le DMP. De fait, les DMP sont pour une part importante créés par des hôpitaux mais les écarts de coût et de performance entre ces systèmes, hétérogènes, demeurent inconnus.

L’enjeu du dossier médical personnel est d’atteindre une densité documentaire garantissant son utilité opérationnelle pour les professionnels de santé. A cet égard, l’analyse des temps de création et d’alimentation par les médecins d’un dossier demeure insuffisante. Les mises en garde antérieures de la Cour quant à la nécessité d’une standardisation appropriée des logiciels de leur poste de travail n’ont pas été suivies d’effet. L’absence plus générale de mise en place d’une méthode d’évaluation médico-économique est à cet égard très anormale.

Le ministère considère comme une priorité la mise au point rapide de cette méthode avec la Haute Autorité de santé. Toutefois, faute de pouvoir identifier les gains de performance pour le système de soins et les économies pour l’assurance maladie, il n’est pas possible de mesurer le retour sur un investissement très lourd, ce qui risque de déboucher sur des impasses financières dangereuses.

L’annonce en novembre 2012 d’un dossier médical personnel (DMP) de deuxième génération, dont les contours, les bénéficiaires et le pilotage restent à définir, rend indispensable d’accélérer cette démarche.

Parallèlement au DMP, l’assurance maladie a instauré par la convention médicale de juillet 2011 un volet médical de synthèse (VMS) annuel210 pour la médecine de ville. Sa création est prise en compte dans la rémunération à la performance mise en place à cette occasion, mais il a été conçu sans référence au DMP, alors qu’une convergence de ces deux outils aurait dû être un préalable indispensable. Une expérimentation en ce sens a certes été lancée avec pertinence par l’agence des systèmes d’information partagés de santé (ASIP Santé), mais les éditeurs de logiciels ont donné la priorité à l’informatisation séparée de ce volet, au détriment de développements l’intégrant au DMP. Le ministère prévoit désormais une meilleure articulation du DMP avec les autres dispositifs et téléservices de partage des informations médicales, y compris le volet médical de synthèse.211

B - Des difficultés à régler dans les téléservices réservés aux professionnels

1 - Les retards dans les référentiels, dans la certification des logiciels et dans la sécurité

En matière d’analyse, d’expertise, de normalisation, de constitution de référentiels, d’agrément, d’homologation et de certification de logiciels, la recommandation de la Cour de développer des études économiques (notamment de retour sur investissement), des indicateurs de performance et des évaluations dans ces domaines n’a, pour l’essentiel, pas été suivie d’effet.


De multiples acteurs interviennent: Haute Autorité de santé, AFNOR, industriels, professionnels et établissements de santé, experts. Ils ont poursuivi leurs efforts, y compris pour les logiciels hospitaliers, mais de manière souvent dispersée. Ont été réalisés depuis 2010 le cadre d’interopérabilité de l’agence des systèmes d’information partagés de santé212, le référentiel du répertoire partagé des professionnels de santé (RPPS), le référentiel de dossier médical personnel-compatibilité, un identifiant national de santé transitoire établi avec la carte Vitale de l’assuré (INS-C) pour sécuriser les données, le référentiel d’agrément des hébergeurs de données de santé, ainsi que des cahiers des charges fonctionnels produits par l’agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé (ANAP) et l’agence des systèmes d’information partagés de santé (ASIP Santé).

Sont annoncés d’ici la fin 2013 des référentiels de certification des logiciels d'aide à la prescription et à la dispensation du médicament, d’accréditation des laboratoires de biologie, de sécurité des systèmes d'information et d’homologation de la messagerie sécurisée de santé.

Les logiciels d’officine ne font pas l’objet d’une procédure d’agrément ; cependant, une de leurs principales fonctions - l’aide à la dispensation - sera soumise à partir de 2015 à la certification déterminée par la loi de renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé du 29 décembre 2011 (article 32).

La délégation à la stratégie des systèmes d’information de santé (DSSIS) a mis en place un comité stratégique des référentiels en septembre 2012 avec les principaux opérateurs concernés, notamment en vue d’harmoniser les répertoires et annuaires des personnes morales, des professionnels et des activités dans les domaines sanitaires et médicosociaux, ce qui va dans le bon sens. Un référentiel unique d'authentification et d'habilitation des professionnels n’a pas encore été élaboré, alors qu’il réduirait coûts industriels et incohérences d’utilisation ; la DSSIS prévoit à cet égard de relancer les travaux de normalisation et la commission nationale de l'informatique de santé et des affaires sociales, naguère abandonnés. De même, le rapprochement entre le dossier pharmaceutique et le dossier médical personnel ne sera pas possible sans la mise en oeuvre d’un identifiant sécurisé, national et unique de santé.

Des retards pour renforcer la confidentialité des données médicales La Cour avait recommandé de stabiliser la stratégie en matière de confidentialité des données médicales. Or, une politique générale de sécurité des systèmes d’information de santé (PSSI) n’a toujours pas été adoptée, bien qu’ayant été annoncée par un décret du 15 mai 2007. Alors que ce texte avait fixé des délais impératifs d’un et trois ans à compter des arrêtés d’application pour sa mise en oeuvre par l’ensemble des acteurs, les travaux alors engagés ont été gelés, ce qui a renforcé le climat d’incertitude entourant la stratégie du ministère. L’agence des systèmes d’information partagés de santé n’a reçu qu’en octobre 2011 la mission d'élaborer, sous le pilotage de la délégation à la stratégie des systèmes d’information de santé, cette politique générale.

Après la définition des principes fondateurs mi-2012, les premiers référentiels sont annoncés pour 2013, cinq ans après que la Cour en a rappelé l’urgence. De son côté, le GIE SESAM Vitale a, lui aussi tardivement, validé le premier volet de sa PSSI en 2011 et devait valider l’ensemble fin 2012. La caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) n’a pas précisé son calendrier en ce domaine pour son programme 2.

Une homologation de logiciels a été entreprise par la direction générale de l’offre de soins dans le cadre du programme Hôpital numérique, mais elle ne sera étendue à l’informatique des professionnels de santé libéraux et du domaine médico-social qu’à plus long terme. Elle porte notamment sur la compatibilité de logiciels avec le dossier médical personnel, leur labellisation pour les maisons et pôles de santé et des certifications relevant de la Haute Autorité de santé en matière d’aide à la prescription.

2 - Les problèmes liés à l’utilisation de la carte de professionnel de santé


Les règles de diffusion et d’usage de la carte de professionnel de santé (CPS) ne sont pas toujours respectées. Elles ont posé des difficultés dans les centres de lutte contre le cancer ainsi que pour des pharmaciens adjoints employés comme intérimaires, qui ne reçoivent pas toujours une CPS, leur statut d’intérimaire n’ayant pas été prévu dans le répertoire partagé des professionnels de santé (RPPS).

Les cartes sont fréquemment utilisées à demeure sur les postes de travail des officines, leur code PIN étant parfois affiché à côté du poste de travail, quel que soit le salarié traitant un dossier. L’accès aux postes de travail se fait parfois par un code simple213 connu de plusieurs salariés, sans ouverture de session au nom de l’utilisateur ni mot de passe. En pareils cas, la délivrance des médicaments et sa saisie dans le dossier pharmaceutique (DP) ne permettent pas de connaître le salarié responsable (avec des conséquences éventuelles en cas de contentieux).

La mise en oeuvre du mode « sans contact », qui préviendrait de tels risques, a été demandée par l’ordre des pharmaciens dès 2007 mais tarde à intervenir, la CPS 3, désormais conforme aux standards internationaux, notamment en ce domaine, n’étant pas encore utilisée à cette fin, faute d’une réflexion suffisante avec les industriels et les utilisateurs.

L’ASIP Santé a investi dans de nouvelles cartes théoriquement valides pour trois ans, mais en les dotant d’un certificat électronique expirant dès le 31 décembre 2014 : des cartes livrées en 2012 devront donc être remplacées prématurément, avec un surcoût de l’ordre de 15 % en 2015. Il convient que l’ASIP Santé veille à ce que cela n’entraîne pas des tentatives de dégradation des fonctions de sécurité pour contourner d’éventuelles difficultés lors du renouvellement des certificats fin 2014, comme cela a été constaté dans le passé.

Les représentants des industriels soulignent que l’environnement technologique de la carte de professionnel de santé est devenu hétérogène, inadapté, voire obsolescent comme le sont aussi certains composants de la CPS. L’évolution vers des modes alternatifs d’authentification n’a fait l’objet d’aucun projet : cela concernerait notamment les « certificats logiciels » implantés dans les postes de travail des professionnels, y compris ceux qui sont « nomades » (tablettes, téléphones intelligents notamment).

Télétransmission : sanctions et incitations

En 2012, 15 % des médecins généralistes et 48 % des spécialistes ne télétransmettaient toujours pas de feuilles de soins électroniques (FSE) via SESAM Vitale.
Alors que la Cour avait recommandé de fixer à un montant dissuasif la contribution prévue à partir de 2010 pour les professionnels de santé ne les télétransmettant pas contrairement à leur obligation, le ministère et la caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés ont renoncé à la sanction réglementaire initialement fixée par feuille de soins et ont adopté un autre moyen en sanctionnant le « non-respect de manière systématique » (adjectif qui laisse une marge de souplesse) de cette obligation par une suspension de trois mois de la prise en charge de leurs cotisations sociales par l’assurance maladie (équivalent à une amende de plus de 3 500 € en moyenne), voire de six mois.

Des incitations supplémentaires ont été instaurées par la convention médicale signée en juillet 2011 entre les médecins libéraux et la CNAMTS dans le cadre de la rémunération à la performance qu’elle met en place. Pour bénéficier de cette dernière, les professionnels doivent désormais télétransmettre 66 % au moins de feuilles de soins, disposer d'un équipement de télétransmission conforme à la dernière version SESAM-Vitale, déclarer les équipements adéquats à la caisse d'assurance maladie et en garder les justificatifs d'achat214.

3 - L’attente de la nouvelle configuration du poste de travail de professionnel de santé

Le programme 2 de la caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) permettra d’alléger considérablement les contraintes ergonomiques et le coût du poste de travail du professionnel de santé. Il a prévu des référentiels et des cahiers des charges permettant aux éditeurs d’intégrer les téléservices dans les logiciels pour professionnels de santé de ville et conduisant à terme à abandonner le dispositif SESAM de transfert différé des données de facturation, qui sera assuré instantanément par Internet. Le GIE SESAM Vitale en assure une partie de la maîtrise d’oeuvre, ainsi que celle du cadre d’interopérabilité entre téléservices et d’accès, tardivement mis en chantier, par les terminaux « nomades » évoqués plus haut.

Toutefois, manque encore la standardisation commune qu’avait recommandée la Cour pour tous les opérateurs et téléservices. Seuls quelques outils pour les éditeurs de logiciel et les plateformes d’assistance par diagnostic à distance ont été produits. La nécessité, reconnue par tous, d’un outil décloisonnant la médecine de ville, les établissements de santé et le secteur médico-social ne fait pourtant que s’accroître.

Par ailleurs, la CNAMTS dispose maintenant d’un outil de diagnostic à distance des anomalies de poste de travail réalisé par le GIE SESAM Vitale, pendant que l’agence des systèmes d’information partagés de santé (ASIP Santé) s’est elle aussi dotée d’un instrument de diagnostic, limité à la compatibilité avec le dossier médical personnel, mais aucune fusion des deux dispositifs n’a été envisagée.

4 - Une messagerie sécurisée en 2013

La nécessité d’une messagerie fortement sécurisée avait fait l’objet d’une recommandation de la Cour, mais sa mise en oeuvre a été tardivement entreprise.
Les professionnels utilisent le plus souvent pour échanger des informations et des pièces jointes concernant leurs patients (résultats d’examen, etc.) les messageries gratuites du grand public. Ces messageries ne présentent pas des garanties de sécurité appropriées pour des données aussi confidentielles. Un dispositif mis en oeuvre par une association depuis les années 1990 n’a été adopté que par une minorité de professionnels et ne correspond pas aux normes et standards en vigueur.

Le GIP CPS avait homologué quelques logiciels dotés d’une fonction de messagerie sécurisée, dont la commercialisation a été un échec du fait de l’absence d’une architecture stabilisée des postes de travail des professionnels. À la demande de l’État, l’ASIP Santé a lancé en 2011, sur la base du code des marchés publics, une consultation des industriels en vue de la mise en oeuvre d’une telle messagerie. Elle a déclaré cette consultation infructueuse au printemps 2012, jugeant les offres inadéquates en termes de coûts et de délais Elle a ensuite transmis aux éditeurs en octobre 2012 les spécifications de l’adaptation de leurs logiciels au dispositif de messagerie sécurisée qu’elle prévoit de gérer directement à partir de mi-2013 (simultanément à un renforcement de la compatibilité de ces logiciels avec le dossier médical personnel). Les choix techniques ainsi opérés n’ont pas fait l’unanimité des industriels, bien qu’ils reposent sur des solutions internationalement reconnues.

L’ASIP Santé évalue son investissement à cet effet à 3,8 M€ et les dépenses de fonctionnement à 1,3 M€ par an, à la charge de l’assurance maladie. Sur la base de 100 000 professionnels qui s’y abonneraient, gratuitement, le prix de revient par abonné à la messagerie sécurisée serait de l’ordre de 24 € par an. Au regard de la lenteur du déploiement du dossier médical personnel, il y aurait lieu que le ministère veille à ce que tous les acteurs concernés (tel que le réseau de délégués de l’assurance maladie que gère la CNAMTS) en accompagnent activement le lancement.

C - Le besoin de meilleure visibilité des industriels

La Cour avait recommandé de veiller à la cohérence des choix avec l’offre industrielle disponible. Un dialogue attentif est mené par la caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), le GIE SESAM Vitale et l’ASIP Santé, mais les représentants de ces derniers ont continué à exprimer avec vigueur leurs inquiétudes face à l’évolution des systèmes publics d’information de santé. Ils sont d’avis que « l’investissement public avance en ordre totalement dispersé, sans objectif clair et sans [la] visibilité » qui leur serait nécessaire pour développer des produits appropriés.

L’offre industrielle est décisive du fait que les téléservices ne deviennent pleinement opérationnels pour un professionnel qu’après modification par les éditeurs du ou des logiciels médicaux qu’il a choisi.

Il peut certes accéder directement aux serveurs de la CNAMTS, sans que son propre système et sa base de données soient concernés mais c’est souvent au détriment de la rapidité et de la simplicité de la connexion.

La difficulté est démultipliée par la variété des systèmes. Quelques 160 sociétés éditent environ 270 logiciels concurrents. Cette dispersion est largement atténuée par le fait que les quinze premiers éditeurs ont été choisis par environ 80 % des professionnels, ce qui leur donne les moyens d’adapter assez rapidement leurs logiciels, si les modifications réglementaires et stratégiques ne s’accumulent plus sans priorité clairement assumée par le ministère. Inversement, un seul fournisseur subsiste au terme de fusions successives pour les lecteurs de cartes propres à SESAM Vitale, ce qui peut être considéré comme une fragilité.

Les représentants de l’industrie considèrent que sur les perspectives d’évolution à moyen terme, comme sur les changements réglementaires et tarifaires à paramétrer à très court terme, la concertation avec le ministère et avec la branche maladie demeure trop limitée pour leur apporter la visibilité nécessaire à leur stratégie de développement en termes d’adaptation, de compétitivité et de rentabilisation de l’outil industriel.

Alors qu’un large consensus entoure l’évolution vers les téléservices en temps réel, la poursuite du développement des outils nécessaires appelle ainsi une plus grande cohérence dans la stratégie dont le ministère des affaires sociales et de la santé a la charge, en mettant l’accent sur la stabilisation des normes, notamment en matière de sécurité, sur la définition du nouveau poste de travail du professionnel de santé, et sur un déploiement du dossier médical personnel cohérent avec le dossier pharmaceutique et les dossiers informatisés hospitaliers. Une clarification des attentes réciproques de l’État et des industriels faciliterait une dynamique nécessaire.

CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS

Les recommandations formulées par la Cour entre 2008 et 2010 visaient à ce que soient améliorées la cohérence et l’efficience des dispositifs publics de services en ligne et de dossiers individuels partagés de santé. Des progrès ont été constatés, mais à ce stade ils apparaissent souvent insuffisants. L’objectif d’aboutir à la convergence des téléservices proposés aux assurés et aux professionnels de santé, a longtemps été annoncé en allant vers une unité d’offre de services, d’interfaces et de mode d’accès aux informations, sans complications résultant des spécificités des systèmes de chacun des partenaires. Un virage stratégique majeur a été amorcé en 2010 par l’État et la caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) pour substituer à terme au dispositif de facturation SESAM Vitale une plateforme de téléservices conçue et gérée par la caisse nationale. Cette décision, en soi indispensable, ne serait pas critiquable si elle n’avait été accompagnée d’un abandon de la stratégie commune qui avait permis le succès de SESAM Vitale et qui avait été validée par la CNAMTS et ses partenaires jusqu’en 2009.

Les difficultés engendrées par ce déphasage entre régimes obligatoires et complémentaires sont aggravées par une visibilité à moins de deux ans des développements en cours au sein de la caisse nationale. Il y a là un handicap majeur aussi bien pour l’efficacité des téléservices annoncés que pour la contribution attendue à cet effet d’acteurs tels que les industriels.

Par ailleurs, l’absence de suivi financier précis et l’impossibilité de consolider le montant des fonds publics considérables consacrés au DMP et au dossier de patient informatisé, sous de multiples formes et par un grand nombre d’acteurs, ne sont pas seulement gravement préjudiciables à l’appréciation de leur coût réel. Ces défaillances attestent aussi d’une absence particulièrement anormale de stratégie et d’un grave défaut de continuité de méthode dans la mise en oeuvre d’un outil annoncé comme essentiel à la réussite de profondes réformes structurelles. En effet, s’agissant de l’organisation du système de santé, avec notamment l’instauration du médecin traitant et la mise en place d’un parcours de soins coordonnés du patient, il en est attendu des gains majeurs d’efficience et de qualité.

Il est particulièrement préoccupant que le ministère de la santé n’y ait pas encore remédié alors qu’il a à plusieurs reprises été alerté par la Cour sur les risques d’une telle situation, à la fois en termes de dérive des coûts et d’atteinte des objectifs espérés. La Cour réitère l’essentiel de ses précédentes recommandations, notamment en matière de sécurité 215, et formule les huit nouvelles recommandations suivantes :

S’agissant du pilotage d’ensemble des téléservices de santé :
1. unifier, au sein de l’administration centrale des ministères chargés de la santé et de la sécurité sociale,
    le pilotage des fonctions de maîtrise d’ouvrage stratégique des téléservices
    relevant directement ou indirectement de l’assurance maladie ;

2. veiller à garantir l’interopérabilité de la plateforme de téléservices de la CNAMTS avec les systèmes d’information
    des organismes complémentaires d’assurance maladie ;

3. à cet effet, restaurer la concertation entre tous les régimes concernés pour une convergence de leurs téléservices.

S’agissant plus spécifiquement du dossier médical personnel :
4. publier le décret en définissant le contenu et le champ du dossier médical personnel ;

5. formaliser la stratégie, la méthode et le calendrier d’interopérabilité entre le dossier médical personnel
    et les dossiers patients hospitaliers et les autres dispositifs similaires ;

6. faire établir entre l’ordre des pharmaciens et le GIP ASIP Santé un protocole définissant les modalités
    et le calendrier d’un rapprochement entre le dossier médical personnel et le dossier pharmaceutique ;

7. prévoir l’intégration systématique du dossier médical personnel dans le cadre de la politique conventionnelle
    de la caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés avec les professions libérales de santé ;

8. identifier les coûts liés au dossier médical personnel et à son évaluation médico-économique
    en termes de gains d’efficience du système de soins et d’économies pour l’assurance maladie.

Sommaire des réponses

Ministre des affaires sociales et de la santé 390
Ministre délégué auprès du ministre de l’économie et des
finances, chargé du budget

Directeur général de la Caisse nationale de l’assurance
maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Directeur général de la Fédération nationale de la mutualité
française (FNMF)

Directeur de l’Agence des systèmes d’informations
partagés de santé (ASIP Santé)

Directeur général du groupement d’intérêt économique
SESAM Vitale

Secrétaire général de l’Union nationale des régimes
spéciaux (UNRS)

Président du Centre technique des institutions de
prévoyance (CTIP)

Président de la Fédération française des sociétés
d’assurances (FFSA)

Présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens

Président de la Haute autorité de santé (HAS)

Destinataire n’ayant pas répondu
Délégué général de la Fédération « Les entreprises des systèmes
d’information sanitaires et sociaux » ( LESSIS)

RÉPONSE DE LA MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE LA SANTÉ

Vous trouverez ci-dessous les éléments de réponse pour éclairer la Cour et mettre en évidence que ses précédentes recommandations sur ce thème ont déjà été largement prises en compte par le ministère. Je souhaite, par ailleurs, faire état d’une convergence de vues sur les sujets faisant l’objet de nouvelles recommandations. Je relève tout d’abord que rapport fait état d’une « incontestable dynamique » dans le domaine des téléservices publics de santé, concrétisée par des développements « rapides et diversifiés ». Le rapport pointe toutefois une « gouvernance problématique » au niveau de l’Etat ainsi qu’une
« stratégie incertaine » des pouvoirs publics, ainsi que des faiblesses ou des retards nuisant au développement des téléservices. Je souhaite apporter à la Cour des éléments d’information sur ces différents points.

1. Le renforcement et la coordination de la fonction de maîtrise d'ouvrage stratégique de l’Etat
en matière de systèmes d'information de santé

Alors que la Cour fait état d’une « triple maîtrise d'ouvrage » au niveau de l’Etat, qui nuirait à la cohérence de la stratégie ministérielle, je précise que le renforcement et la coordination de cette fonction au sein de l’administration centrale du ministère des affaires sociales et de la santé constitue un axe de travail prioritaire. Cette démarche a notamment abouti à la création de la délégation à la stratégie des systèmes d'information de santé (DSSIS) par décret du 5 mai 2011, structure légère placée auprès du secrétaire général des ministères chargés des affaires sociales.

Désormais, un service clairement identifié et pourvu de moyens spécifiques (14 agents), a pour mission d’assurer la coordination des travaux portant sur la stratégie ministérielle dans le domaine de la « e-santé » en liaison avec les directions d'administration centrale et l’assurance maladie. Selon les termes du décret portant création de la DSSIS, celle-ci est en effet chargée d’animer le travail d’élaboration des orientations et des priorités nationales dans le domaine des systèmes d'information de santé et médico-sociaux et de « coordonner les actions des services de l’Etat, des organismes d’assurance maladie, des agences et organismes intervenant dans le domaine de la santé, des services et des établissements de santé, des services et des établissements médico-sociaux et de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), en vue de la mise en oeuvre de la politique nationale de l’informatisation du système de santé et médicosocial ».

La DSSIS participe également à la préparation des décisions du conseil national de pilotage des agences régionales de santé en matière de systèmes d'information. Elle assure par ailleurs la tutelle du GIP ASIP Santé. Cette unité de conception et d’action s’est matérialisée en 2012 dans un document d’orientation définissant les priorités majeures pour l’e-santé. Ce document, mentionné dans le rapport, est en cours d’examen et a été transmis à la CNAMTS afin de recueillir ses observations. 

S'agissant du constat de l'existence de trois lieux de coordination stratégique (DSSIS, direction générale de l'offre de soins, direction de la sécurité sociale), il convient d'observer que si les questions relatives à la sécurité sociale dans sa dimension de financement sont prises en compte par la seule direction de la sécurité sociale, l'ensemble des sujets relatifs à la stratégie et au fonctionnement opérationnel du système de santé sont traités en collaboration entre la direction générale de l'offre de soins, la direction de la sécurité sociale, la direction générale de la santé et la DSSIS. Cette collaboration se matérialise notamment à travers une participation croisée aux instances de pilotage des différents chantiers conduits par les directions et par la DSSIS, notamment dans le domaine des téléservices de santé.

Par ailleurs, afin de renforcer la coordination entre les différentes directions et les opérateurs, la DSSIS a mis en place depuis le mois d'octobre dernier, comme le relève la Cour, une réunion bimestrielle regroupant les correspondants de systèmes d'information des directions d'administration centrale, de la CNAMTS et de la CNSA.

2. Le pilotage stratégique de la CNAMTS en matière de systèmes d'information et des téléservices

Si la Cour constate qu’une « forte dynamique » est à l’oeuvre dans le secteur des télé-services publics de santé, elle souligne le risque pesant sur ses modalités de gouvernance. Je partage l’appréciation portée par la Cour concernant les risques qui peuvent résulter des initiatives déployées par l’assurance maladie et plus particulièrement la CNAMTS, si celles-ci ne s’inscrivaient pas rapidement dans le cadre d’une gouvernance stabilisée et intégrant les préoccupations de l’ensemble des acteurs du système de soins. 

La CNAMTS, dans le cadre de sa convention d’objectif et de gestion et de son schéma directeur des systèmes d’information, a engagé, avec un réel volontarisme, la modernisation de son système d’information en mettant en oeuvre notamment, ainsi que le souligne le rapport, des bouquets de télé-services, conformes à l’état de l’art technologique, à destination de ses assurés et des professionnels de santé, ainsi que des employeurs. Cette orientation lui permettra de valoriser son patrimoine applicatif et de se dégager des contraintes inhérentes aux technologies propriétaires dont l’obsolescence croissante risquerait, à terme, d’obérer sa capacité à aligner son système d’information sur les enjeux métier de l’assurance maladie et d’une manière plus générale sur les politiques publiques de sécurité sociale et de santé.

C’est dans ce contexte que les services de l’Etat ont approuvé, en juillet 2011, le schéma directeur des systèmes d’information de la CNAMTS qui comporte notamment un programme ambitieux de développement de télé-services destinés aux professionnels de santé (programme 2). A cet égard, il convient de rappeler que l’attention du directeur général de la caisse nationale a été appelée sur le fait que le schéma directeur avait été approuvé sous réserve que la CNAMTS fasse des propositions quant à la gouvernance du « programme 2 », relatif aux services destinés aux professionnels de santé, associant l’ensemble des régimes gestionnaires de l’assurance maladie obligatoire ainsi que les organismes chargés de la gestion de l’assurance maladie complémentaire. Compte tenu de l’expérience acquise dans les télé-services, de son rôle prépondérant dans l’assurance maladie obligatoire (85 % des bénéficiaires de la couverture maladie sont affiliés au régime général) et de sa mission de relation avec les professionnels de santé libéraux dans le cadre de l’UNCAM, la CNAMTS a légitimement vocation à être le chef de file de ce renouveau des services proposés aux professionnels de santé. Cette orientation stratégique majeure traduit la volonté du ministère de s’assurer en premier lieu que les professionnels de santé n’auront plus qu’un seul interlocuteur pour les télé-services de l’assurance maladie obligatoire.

En second lieu, il s’agit de mutualiser les développements des systèmes d’information des nombreux organismes gérant l’assurance maladie obligatoire dans le contexte actuel des finances publiques. Cette orientation sera inscrite dans le plan stratégique du système d’information de la sécurité sociale, prévu à l’article L. 114-23 du code de la sécurité sociale. Il résulte de cette orientation que la gouvernance inter-régimes et l’association de l’assurance maladie complémentaire devront être précisées et stabilisées au cours de l’année 2013.

Les recommandations de la Cour portent par ailleurs sur les trois points suivants :
- la gouvernance interne au ministère,
- la concertation et l’interopérabilité avec les systèmes d’information de l’assurance maladie complémentaire,
- la concertation avec les régimes gestionnaires de l’assurance maladie obligatoire.

S’agissant du premier point, l’analyse de la Cour quant à la nécessité d’avoir au sein du ministère une vision cohérente et coordonnée des actions conduites dans le secteur des télé-services publics de santé n’est à l’évidence pas contestable. La cohérence des actions entre les directions et délégations du ministère est constamment recherchée. S’agissant du deuxième point, le système SESAM-Vitale, opérationnel depuis 20 ans, doit évoluer. En particulier, il repose sur un système unique et commun entre l’assurance maladie obligatoire et l’assurance maladie complémentaire. Bien que le système soit commun, les organismes d’assurance maladie complémentaire ont toujours été attachés à un cloisonnement complet entre leur système d’information et celui de l’assurance maladie obligatoire. C’est pour la pratique du tiers payant sur la part complémentaire que l’impact est le plus important. De ce fait :

- la carte Vitale n’est pas une carte d’assurance maladie « globale » (obligatoire et complémentaire). En effet, moins de 200 000 assurés en gestion séparée ont un volet complémentaire en carte Vitale. De plus, même si les droits de la complémentaire sont inscrits sur la carte, sa mise à jour ne peut être effectuée de manière synchrone entre l’assurance maladie obligatoire et complémentaire. La transmission des informations de remboursement s’effectue donc selon des normes d’échanges ad-hoc. Enfin, il convient d’ajouter que les complémentaires privilégient des cartes spécifiques qui sont de plus à même de servir de vecteur de communication commerciale ;

- la demande de remboursement électronique (DRE) qui est le flux SESAM-Vitale analogue à la feuille de soins électronique mais à destination des complémentaires a connu un développement peu significatif : moins de 1 million de DRE par mois à comparer aux 100 millions de FSE ;

- cette volonté d’autonomie a permis le développement significatif de prestataires indépendants (opérateurs de tiers payant) qui proposent des télé-services spécifiques aux complémentaires auprès des professionnels de santé du secteur de l’optique, du secteur dentaire et de la pharmacie, pour lesquels le tiers payant pour la part complémentaire est prioritairement
pratiqué. 

Dans ce contexte, le ministère veillera à la compatibilité et l’interopérabilité des télé-services proposés par les organismes d’assurance maladie obligatoire et complémentaire, notamment dans le contexte de l’intégration aux logiciels métier des professionnels de santé. 

S’agissant du troisième point, il convient de rappeler que l’objectif majeur de la concertation entre les organismes d’assurance maladie obligatoire est de s’assurer, d’une part, que l’offre de télé-services destinée aux professionnels de santé soit une solution inter-régimes transparente pour ces professionnels et couvrant l’ensemble des assurés sociaux, quel que soit leur régime de rattachement, et, d’autre part, que les moyens mis en oeuvre soient mutualisés entre ces organismes. Ainsi, la réussite de ce programme est étroitement liée à l’effectivité de l’association de tous les organismes concernés, y compris les SLM (Sections Locales Mutualistes). Ainsi, l’équipe projet du programme comprend des représentants de la MSA, du RSI et de la MFP. Je serai particulièrement vigilante à ce que la nouvelle gouvernance soit stabilisée et que l’architecture cible de la solution soit partagée entre les partenaires afin que ces derniers puissent préparer la rénovation de leur système d’information correspondant.

3. Le déploiement du dossier médical personnel (DMP)

Je partage l’analyse de la Cour qui relève un défaut de stratégie et de méthode depuis l’origine du projet, et qui demande, au-delà du constat du caractère techniquement opérationnel du DMP, qu’une attention particulière soit portée à ce que le dispositif réponde aux besoins des professionnels de santé, avec un souci particulier de mesure de son efficience. Considérant l’utilité potentielle du DMP comme instrument au service de la qualité du parcours de soins, j’ai décidé de la réorientation du projet, ainsi que de la réforme de son pilotage et de sa gouvernance. Dans le cadre de cette nouvelle stratégie, la feuille de route d’un DMP de seconde génération devra être rapidement élaborée, dans une démarche de concertation avec les représentants des professionnels de santé et des
patients. Ce plan d’action devra notamment prendre en compte la nécessité d’une articulation entre le DMP et les dossiers patients hospitaliers, mais également avec d’autres dispositifs et téléservices de partage des informations médicales tels que le dossier pharmaceutique, le dossier de cancérologie communicant et le volet médical de synthèse de médecine de ville.

Comme le recommande la Cour, la mise en oeuvre du DMP devra être réalisée en liaison étroite avec l’assurance maladie et intégrée dans les dispositions de la politique conventionnelle de la CNAMTS avec les professions libérales de santé. L’absence de publication d’un décret d’application du DMP n’est pas due à un retard de l’administration mais à la décision - prise en accord avec la CNIL - d’attendre de disposer de suffisamment d’éléments d’appréciation du fonctionnement du dispositif avant d’inscrire des règles dans un texte réglementaire sur un sujet complexe et délicat.

Enfin, en accord avec la recommandation de la Cour, je considère comme une priorité de mettre au point rapidement, en liaison avec la Haute autorité de santé, une méthode d’évaluation médico-économique de l’efficience du DMP et de rendre compte régulièrement des dépenses qui seront consacrées à sa mise en oeuvre.

4. Le pilotage et la mise en oeuvre des projets au niveau régional

La Cour préconise la définition d’une stratégie et de priorités, ainsi qu’une évaluation rigoureuse des gains de performance qu’il conviendra de tirer de cette mutualisation. Je précise que cette démarche est déjà engagée sur la base d'une enquête conduite au cours du second semestre 2012. Lancée à l’initiative de
la DSSIS et de l'ASIP Santé, cette analyse a pour objectif de faire un premier bilan de l'organisation et de l'action des maîtrises d'ouvrage régionales. Les
premiers résultats de cette enquête, d'ordre quantitatif, ont été communiqués à la Cour.

Une stratégie sera élaborée dès les premiers mois de 2013, en liaison avec les directions générales des ARS, afin d’assurer une cohérence d’ensemble dans le cadre de priorités nationales.

5. L’élaboration de référentiels pour assurer la convergence entre les plateformes de téléservices

Comme l’indique la Cour, il est nécessaire de renforcer la démarche tendant à développer des outils permettant la convergence, l’interopérabilité et la sécurité des diverses plateformes de télé-services en cours de mise en oeuvre.

Je considère comme une priorité de garantir l'interopérabilité des différents composants qui cohabitent au sein du poste de travail des professionnels de santé, qu'ils soient produits par l'assurance maladie ou par l'ASIP-Santé. Cette préoccupation sera prise en compte dans le cadre de l'élaboration de la feuille de route du DMP de deuxième génération qui devra s'intégrer avec l'ensemble des télé-services existants ou à venir. L’Etat et l’assurance maladie doivent avoir pour objectif principal de simplifier l’utilisation des systèmes d'information et télé-services de santé par les professionnels comme par les patients et les citoyens, d’en élever le niveau de sécurité et de confidentialité et d’en maîtriser les coûts.

RÉPONSE DU MINISTRE DÉLÉGUÉ AUPRÈS DU MINISTRE DE L’ÉCONOMIE ET DES FINANCES, CHARGÉ DU BUDGET

Je partage l'essentiel des analyses et propositions faites par la Cour, en particulier le constat d'une forte dynamique des téléservices, qui se traduit parfois par un foisonnement désordonné, notamment au niveau local. Aussi, les propositions visant à mettre en place les outils de management indispensables pour unifier le pilotage des fonctions de maîtrise d'ouvrage stratégique des téléservices et pour permettre l'inter-opérabilité du dossier médical personnel (DMP), du dossier patient hospitalier et du dossier pharmaceutique me paraissent centrales. Il est également important de prévoir l'intégration systématique du DMP dans le cadre de la politique conventionnelle de la CNAMTS avec les professions libérales de
santé. La recommandation visant à identifier les coûts liés au DMP et à réaliser son évaluation médico-économique en termes de gain d'efficience du système de soins et d'économies pour l'assurance maladie est un autre enjeu majeur, comme le relève la Cour. Sans attendre, je souhaite souligner la nécessité, à ce stade, de mettre en cohérence l'ensemble des déploiements de téléservices recensés, afin d'éviter des financements non coordonnés et improductifs.

RÉPONSE DU DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA CAISSE NATIONALE DE L’ASSURANCE MALADIE DES TRAVAILLEURS SALARIÉS (CNAMTS)

Tout comme la Cour, la CNAMTS tient à souligner « l’incontestable dynamique » qui s’est instaurée dans le milieu des systèmes d’information de santé ces dernières années. Le développement des services offerts par le GIE Sesam Vitale, la mise en place des cartes CPS, le lancement du dossier médical personnel, le développement des dossiers pharmaceutiques et les travaux de modernisation de l’assurance maladie, qui permettent d' intégrer l’usage d’internet dans les échanges dématérialisés entre l'assurance maladie d'une part, les assurés et les professionnels de santé d'autre part, sont autant de preuves de la volonté de l’ensemble des acteurs de développer l'usage des technologies de l'information au bénéfice d’une amélioration du service rendu tant aux usagers qu’aux professionnels. S'agissant en premier lieu des téléservices développés par la CNAMTS en direction de ses assurés, il convient de noter que le cap des 10 millions d'assurés ayant ouvert leur compte sur ameli.fr a été franchi en septembre dernier et que le rythme du déploiement de ce téléservice et de ses usages illustrent vraisemblablement le niveau de la qualité de ce service. 

S'agissant des téléservices principalement développés depuis 2006 en direction des professionnels de santé, la dynamique initiale de leur déploiement s'explique par leur enrichissement progressif et régulier par des fonctionnalités nouvelles répondant pour la plupart à des attentes de simplification ou d'enrichissement du service de la part des professionnels de santé ou des caisses d'assurance maladie. A fin novembre 2012, la CNAMTS dénombrait 495 763 professionnels inscrits au compte professionnel, soit plus de 75 % des professionnels de santé. Les principaux nouveaux services en ligne (la déclaration de médecin traitant, l’historique des remboursements, l’avis d’arrêt de travail …) ont vu leur fréquentation tripler sur l’année écoulée preuve de qualité des services offerts et de leur adéquation avec les attentes des professionnels.

Progressivement, le développement de l'adhésion des professionnels à ces nouveaux services et les fonctionnalités nouvelles offertes par un usage plus approfondi d'internet ont conduit le régime général d'assurance maladie, dans le cadre du schéma directeur des systèmes d'information approuvé par l'Etat, à préciser le cadre du développement stratégique de ces téléservices.

 

1- Sur la stratégie de développement des nouveaux téléservices

Concernant l’assertion portée par la Cour d'une réalisation « brique par brique », la CNAMTS tient à préciser que les objectifs stratégiques du programme sont étroitement liés aux enjeux inscrits dans la convention d’objectifs et de gestion signée entre la CNAMTS et l'Etat :
- contribuer à renforcer la qualité des soins.
- réduire le déséquilibre financier du régime général de l’assurance maladie.
- poursuivre l’amélioration de la qualité de service aux assurés, et professionnels de Santé.
- mettre au service de cette politique des systèmes d’information réactifs et performants.

Ainsi, les projets en cours prévoient d’offrir progressivement les services suivants :
- la dématérialisation des principaux processus autres que la facturation, et notamment la prescription électronique de tous les types de prestations et son utilisation par les Professionnels prescrits.
- la facturation en ligne des soins par les Professionnels prescrits sur la base des prescriptions électroniques.
- la dématérialisation des différentes pièces justificatives.
- la dématérialisation de différents formulaires (avis d’arrêt de travail, déclaration médecin traitant …)
  et leur intégration dans les bases et les processus de traitement de l’Assurance Maladie.

La stratégie ainsi clairement posée, sa mise en oeuvre opérationnelle a été déclinée de manière progressive, par étapes successives permettant à chaque pas de valider plusieurs éléments :
- la faisabilité technique.
- l’acceptabilité par les Professionnels.
- les impacts en termes d’organisation pour les organismes du réseau (CPAM et Service Médical).

Cette démarche pragmatique permet de capitaliser sur des réalisations concrètes et d’intégrer les retours d’expérience pour les étapes suivantes, comme le préconise les méthodes modernes de conduite de projet « agile » qui se veulent plus pragmatiques que les méthodes traditionnelles. La première étape du projet de facturation en ligne a ainsi permis de répondre aux attentes des caisses et des transporteurs sanitaires pour leur offrir progressivement des téléservices dans le cadre d’un processus étendu, de la prescription dématérialisée jusqu'à la facturation. Ce téléservice a permis de disposer d'un socle technique réutilisable pour les autres types de prestations (médicaments, actes de kinésithérapie, actes infirmiers …).

Il convient de noter que l'une des différences fondamentales avec l'approche antérieure de dématérialisation de la facturation basée sur la carte Vitale repose sur la mise en place progressive d'échanges en temps réel ou légèrement différé entre les systèmes d'information de l'assurance maladie et ceux des professionnels de santé, de manière à accélérer les processus de traitement (exploitation des droits des assurés en ligne, intégration automatisée du choix du médecin traitant, prise en compte optimisée des demandes d'ALD ou des prescriptions d'arrêts de travail...). Pour dégager les gains escomptés, le développement de ces nouveaux téléservices doit tenir compte de façon plus importante que précédemment de l'intégralité du processus de traitement, ce qui suppose de disposer d'une connaissance intime des systèmes d'information de chacun des régimes concernés.

C'est pourquoi la gouvernance antérieure paraît devoir être adaptée pour concilier d'une part les attentes légitimes des régimes obligatoires qui assurent la très grande majorité de nos concitoyens, les contraintes techniques inhérentes aux choix d'organisation passés ou à la gestion multibranches, ainsi que les interrogations des organismes complémentaires consécutives à cette relative rupture technologique que constitue l'usage étendu d'internet dans les systèmes de santé.

2- Sur la gouvernance inter régimes des téléservices de l'assurance maladie

Concernant plus particulièrement les téléservices développés par l'assurance maladie en direction des professionnels de santé, la Cour évoque une régression présumée de la coordination inter régime liée à la mise en place d’un projet par la CNAMTS d’évolution du traitement de la facturation permettant son traitement en temps réel. Au-delà de l’aspect technologique qui, comme vous le soulignez, est conforme aux bonnes pratiques informatiques, le pilotage de ce programme ne va pas à l’encontre d’une gouvernance inter régime mais essaye, à l'inverse, de concilier la contrainte de résultats et la capacité indéniable d'entraînement que représente le régime général vis-à-vis des assurés et des professionnels avec l'exigence d'un déploiement progressif pour l'ensemble
des assurés sociaux. 

Si la CNAMTS assume effectivement les développements de certains composants informatiques des services inter régimes, le pilotage du programme associe l’ensemble des acteurs des autres régimes pour ce qui est de la conception et de l’architecture du système. En effet, au-delà des orientations stratégiques qui ont fait l’objet de débats lors de réunions périodiques avec l’ensemble des caisses membres de l’UNCAM, la gouvernance du programme s’articule autour d’un comité de pilotage inter régime qui associe la MSA, le RSI, la CNMSS désignée comme représentant de l’UNRS, et un certain nombre de mutuelles délégataires du régime obligatoire. Ces évolutions se mettent par ailleurs en oeuvre dans un contexte plus général de réduction du nombre des systèmes d'information des organismes gestionnaires des régimes d'assurance maladie, pour des raisons tendant à la fois à la complexité des évolutions règlementaires et au coût de développement de ces systèmes.

Aussi, l'appréciation des paragraphes 2 et suivants selon laquelle la CNAMTS « a mis les autres régimes devant le fait accompli », ou « les parties prenantes ont souligné à la cour qu’elles n’ont pas été associées à la conception de cette nouvelle architecture» parait à cet égard devoir être nuancée. En effet, les nouveaux outils informatiques développés par la CNAMTS pour l’ensemble des professionnels de santé sont autant de preuves de l’implication constante de la CNAMTS dans une conception inter régime des services offerts aux professionnels de santé. L’avis d’arrêt de travail a par exemple été réalisé en partenariat avec la MSA et le RSI et permet aux professionnels d’adresser leurs avis aux trois régimes sans distinction. L’historique des remboursements, la déclaration de médecin traitant, le processus de contact ‘assurance maladie par courriel’, ou la déclaration de tiers payant sont également ouverts pour la MSA, le RSI mais plus largement pour la CAMIEG, la CAVIMAV, la CNMSS, la CRPCEN, l’ENIM, MGP, la SNCF et la MNH.

Quant aux services relatifs à la CMU, aux ACS, à l’exonération du ticket modérateur, au relevé mensuel de paiement ou aux indus, outre le régime général, la CAVIMAV, la CNMSS, la CRPCEN, l’ENIM, MGP en bénéficient également. Au-delà des services déjà déployés, la feuille de la route de la CNAMTS en matière de développements informatiques prévoit que les services de consultation de la patientèle du médecin traitant, l’affichage des droits, ou l’annuaire des organismes soient ouverts en inter régime à horizon de la fin d’année 2013. Mais la principale avancée de l’année 2013 réside certainement dans l’intégration du volet inter régime des services au sein des logiciels de gestion des professionnels de santé. Acquisition des droits en ligne, couverture de l’assuré, calcul du taux de prise en charge pour les taxis, accord préalable électronique, information du médecin traitant, information ALD, protocole de soins électronique, certificat médical accident de Travail / maladie professionnelle sont autant de services qui se verront déclinés dans une version dite ‘intégrée logicielle inter régime’ permettant aux professionnels de gérer leurs relations avec l’assurance maladie indépendamment du régime directement depuis leur propre logiciel de gestion. En tout état de cause, la question de l'évolution de la gouvernance antérieure est effectivement posée, au regard de l'accélération constatée du développement des nouveaux téléservices, en cohérence avec les objectifs des conventions applicables aux différentes professions de santé concernées.

Le souhait de ces professions étant, par ailleurs, d'être plus largement associées aux choix stratégiques par le biais des accords. 3) Sur l’avenir du système SESAM VITALE Le relevé d'observations provisoires évoque par ailleurs le risque d'une inadaptation progressive du système de facturation SESAM-Vitale dans l'attente de son remplacement par un système de facturation en ligne à un horizon 2017 - 2020 en s'appuyant sur la décision de la CNAMTS de n'assurer que la maintenance courante du système de facturation SESAMVitale. La CNAMTS est consciente de ce risque et, de fait, la décision de n'assurer que la maintenance courante ne s'applique évidemment pas au système de facturation SESAM-Vitale mais aux seuls composants de l'architecture IMARS.

La CNAMTS s’appuie très largement sur le système de facturation SESAM-Vitale et y intègre des télé services qui permettent d'en développer sa valeur et son usage : la scannérisation des ordonnances, les télé service d'acquisition des droits dans les logiciels de FSE ainsi que la rénovation du socle technique des composants lecteurs pour l'introduction des lecteurs PC/SC début 2013 attestent de cette volonté. Au-delà des projets d'évolutions progressives des fonctionnalités du système de facturation SESAM-Vitale, la CNAMTS a également renforcé les missions du GIE SESAM-Vitale afin de garantir la cohérence de l'intégration des différents services (FSE et télé services) et composants techniques de l'assurance maladie dans les logiciels des professionnels de santé en lien avec les industriels du secteur. Toutes ces actions tendent à maintenir la dynamique d'évolution de services et de composants en cours, et à conforter les missions du GIE SESAM-Vitale tout en permettant aux équipes d'appréhender progressivement les évolutions du système de facturation SESAM-Vitale vers le futur système de facturation en ligne.

 

RÉPONSE DU DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA FÉDÉRATION NATIONALE DE LA MUTUALITÉ FRANÇAISE (FNMF)

Vous soulignez la « gouvernance problématique » des systèmes d’information au niveau de l’État, et notamment le fait que « l’administration reconnaît qu’elle devrait y associer les organismes complémentaires d’assurance maladie ». La FNMF est en effet convaincue de l’importance d’une coordination au plus haut niveau sur les sujets de systèmes d’information, car ces systèmes impactent directement le parcours de santé de nos adhérents, la capacité des professionnels de santé à exercer leur activité le plus simplement possible, et la possibilité pour les mutuelles de rembourser les uns, solvabiliser les autres, et contribuer au final à une réelle maîtrise des dépenses de santé. Or, la Cour constate la « stratégie d’autonomie de la CNAMTS », qui marque un « recul en terme d’organisation et de gouvernance », et se traduit par un « abandon de la stratégie commune qui avait permis le succès de SESAM Vitale et qui avait été validé par la CNAMTS et ses partenaires jusqu’en 2009 ».

La FNMF et les autres familles de complémentaires santé ont indiqué, comme le fait la Cour, que l’accord cadre de 2000 qui avait posé les bases de la collaboration entre les partenaires était désormais « vidé de l’essentiel de sa substance » par le nouveau schéma directeur de la CNAMTS. Elles ont exprimé ce point de vue dans un courrier au Ministre de la Santé en février 2012 et à de nombreuses reprises, au sein des instances du GIE Sesam Vitale. Désormais, la stratégie de la CNAMTS est bien de substituer « sa propre plateforme de service au dispositif inter-régime existant », et de mettre en place « des téléservices uniquement au sein de son propre système d’information ».

Cette stratégie ne peut malheureusement pas convenir aux autres partenaires, et singulièrement aux organismes complémentaires. Il nous paraît d’ailleurs surprenant que la CNAMTS puisse définir une nouvelle stratégie de services en ligne et introduire des changements radicaux bien au-delà de son propre système d’information, sans que ce changement d’orientation ne s’accompagne d’un minimum de concertation et d’une étude d’impact sur les systèmes d’information des autres partenaires et sans que, fait plus grave à nos yeux, l’État ait pu en mesurer tous les enjeux.

La Cour souligne, à juste titre selon nous, les risques que cette démarche fait courir à la continuité et à l’évolutivité des services informatiques en place. Cela est d’autant moins compréhensible que c’est la CNAMTS, en tant que responsable de la maîtrise d’ouvrage au sein du GIE Sesam Vitale, qui assurait jusque-là la coordination des maîtrises d’ouvrages des régimes généraux et complémentaires. Malgré cela, le schéma directeur de la CNAMTS n’a pas posé la question de l’interopérabilité de son système d’information avec celui des autres acteurs. Les observations de la Cour confirment qu’une réflexion stratégique doit être engagée sur les missions et la gouvernance du GIE SESAM-Vitale pour assurer la transition entre le système SESAM-Vitale d’aujourd’hui et les téléservices « en temps réel » de demain. Nous considérons, comme la Cour, que l’évolution de la CNAMTS vers les téléservices est sans doute indispensable, mais que cette évolution n’implique pas de renoncer à une stratégie commune.

Nous pensons pour notre part qu’au-delà de la question d’une phase de transition, un GIE SESAM-Vitale rénové pourrait jouer demain un rôle important. D’une part en matière de coordination des maîtrises d’ouvrage des partenaires et des professionnels de santé pour la conception de téléservices interopérables et le partage de référentiels, et d’autre part pour la mise en commun des moyens nécessaires au déploiement des téléservices auprès des éditeurs. Il s’agirait d’utiliser le GIE pour répondre à la demande de visibilité des industriels et aller plus vite vers « la standardisation commune qu’avait recommandée la Cour pour tous les opérateurs et téléservices ».

La FNMF s’associe pleinement aux recommandations de la Cour pour améliorer la coordination des maîtrises d’ouvrage stratégiques concernées par les téléservices, et pour garantir l’interopérabilité des systèmes d’information des organismes d’assurance maladie. Elle souhaite cependant que ces recommandations soient mises en oeuvre dans un réel esprit de coopération, en respectant les missions et les besoins de tous les acteurs concernés, et avec comme objectifs d’améliorer la prise en charge des assurés et de simplifier les échanges avec les professionnels de santé. Elle saura alors se mobiliser pour apporter sa contribution au développement des téléservices et à l’amélioration des systèmes d’information de santé. RÉPONSE DU DIRECTEUR DE L’AGENCE DES SYSTÈMES D’INFORMATION PARTAGÉS DE SANTÉ (ASIP SANTÉ) La réponse de l’ASIP Santé porte sur le chapitre III. De nombreux développements à améliorer. A – Le déploiement du dossier médical personnel « Le coût total de développement du dossier médical personnel a été d’au moins 210 M€ entre la loi de 2004 l’ayant instauré et fin 2011. Le quart environ en a été dépensé en expérimentations, sans lendemain mais qui ont néanmoins permis de clarifier certains problèmes juridiques, organisationnels et techniques ». L’ASIP Santé souligne qu’au sein des 210 M€ identifiés, suivant les chiffres produits par la Cour des comptes elle-même, la part directement imputable au DMP est de 150 M€, comportant : - à hauteur 90 M€, les coûts des expérimentations de 2005 à 2009, soit un montant plus proche de la moitié que du quart ; - à hauteur de 60 M€, les coûts de conception, réalisation et déploiement du DMP actuel de 2009 à 2011, sous l’égide de l’ASIP Santé. La différence avec les 210 M€ évoqués est constituée, toujours selon le rapport de la Cour, de 17 M€ de financements nationaux «concomitants», et de 44 M€ d’opérations identifiées par les ARS, avec financements déconcentrés et locaux, montants qui ne s’appliquent pas directement au DMP, voire même qui, pour certains, sont appelés à disparaître du fait de la mise en place du DMP. En effet, les 44 M€ consacrés à des dispositifs régionaux de dossiers médicaux partagés sont financés le plus souvent, depuis 2005, via le Fonds d’intervention pour la qualité des soins de ville (FIQSV), puis, à partir de 2007, via le Fonds d’intervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQCS).

Or le DMP est appelé à se substituer à ces dispositifs régionaux expérimentaux, et à faire disparaître de tels centres de coûts. Aussi ces dépenses constituent-elles autant de sources d’économies que le DMP permettra de réaliser. Dans plusieurs régions, comme l’Aquitaine, la Picardie ou l’Alsace, il a été mis fin, lors du déploiement du DMP, à ces dispositifs régionaux et par là-même aux dépenses auxquelles ces régions étaient exposées, le plus souvent sur les fonds de l’assurance maladie. B – Des difficultés à régler dans les téléservices réservés aux professionnels

1 – Les retards dans les référentiels, dans la certification des logiciels et dans la sécurité L’ASIP

Santé souligne qu’elle se trouve être à l’origine, en lien avec les différents partenaires concernés, de la quasi-totalité des réalisations mentionnées : cadre d’interopérabilité, RPPS, référentiel de DMPcompatibilité, INS-C, référentiel d’agrément des hébergeurs de données de santé, cahiers des charges fonctionnels. A ces réalisations s’ajoute, toujours à l’initiative de l’ASIP Santé dans les suites d’une étude commandée par la DGOS, le processus de labellisation destiné aux logiciels «Maisons et Centres de santé», lancé depuis août 2012 par l’ASIP Santé. Ce label peut être attribué à toute solution logicielle ou famille de produits destinée aux professionnels de santé exerçant en maison ou centre de santé respectant le cadre fonctionnel publié par l’ASIP Santé. Toute la procédure est accessible depuis le site esante.gouv.fr.

2 - Les problèmes liés à l’utilisation de la carte de professionnel de santé

La problématique de l’expiration des certificats au 31 décembre 2014 a été résolue suivant des modalités qui ont fait l’objet d’une information largement diffusée par l’ASIP Santé aux acteurs concernés. Elle ne porte pas sur les cartes émises depuis moins de 3 ans comme évoqué dans le rapport mais sur les cartes émises pendant quelques mois courant 2012.

- en attendant l’offre de produits de certification correspondant à la nouvelle Infrastructure de Gestion de Clés («l’IGC-Santé»), l’ASIP Santé a prorogé l’IGC actuelle des cartes CPS (IGC-CPS2ter) jusque fin 2020. La nouvelle chaîne de certificats de l’IGC – CPS2Ter est publiée sur l’Annuaire CPS et l’espace Intégrateurs CPS ;
- depuis le 1er décembre 2012, l’ASIP Santé émet à nouveau les cartes CPS 3 avec une durée de validité nominale de 3 ans, soit avec une date d’expiration qui dépassera fin 2014.

L’obsolescence mentionnée dans le rapport et évoquée par les industriels du secteur ne porte pas sur la carte CPS3, qui est désormais conforme aux standards internationaux et à l’état de l’art, mais sur certains composants d’accès aux cartes dans le seul cadre de la production des Feuilles de Soins Electroniques.

La CPS3 se présente en fait comme trois cartes en une : une carte CPS2ter, une carte IAS-ECC et une carte sans contact :

- Une carte CPS2ter pour assurer la compatibilité avec les applications déjà déployées sur le terrain. Les applications utilisant les API Sesam-Vitale, l'API CPS et/ou la Cryptolib CPS sont toujours en mesure, sans évolutions, de fonctionner avec la CPS3.
- Une nouvelle carte conforme au standard industriel (IAS-ECC), qui représente la cible vers laquelle toutes les applications terrain doivent migrer à terme. La carte IAS-ECC constitue le standard choisi en France pour l’Administration. Ce standard prend en compte le standard européen ECC (European Citizen Card) et représente le socle de développement de l’ensemble de l’identité et donc de l’économie numérique en Europe. Encore récent, il doit permettre une offre industrielle interopérable et la normalisation des échanges entre la carte et le terminal (qu’il s’agisse d’un poste de travail personnel ou professionnel).
- Une carte sans contact destinée à améliorer l’ergonomie d’usage de la carte CPS, notamment dans les établissements de santé ou en situation de mobilité. La carte CPS3, grâce à ses capacités cryptographiques, permet la mise en oeuvre de mécanismes de sécurité indispensables pour la eSanté. Les usages encore modestes du mode sans contact sont liés au cycle de vie des solutions logicielles du marché de la santé. Outre les évolutions déjà engagées avec la CPS 3, les modes alternatifs d’authentification, notamment pour répondre aux situations de mobilité, font l’objet de différents travaux de l’ASIP Santé.

Sont ainsi par exemple à l’étude depuis 2012, via la réalisation d’un POC (Proof of Concept) :

- l’enrôlement des dispositifs (devices) sur un portail par authentification CPS, pour permettre ensuite l’authentification en mobilité sur la base de l’identification du device, associée à un secret connu du professionnel de santé,
- l’étude de modalités de type OneTimePassword, certificats, mot de passe. L’utilisation de ces modes alternatifs requiert une évolution du cadre juridique.

3 – L’attente de la nouvelle configuration du poste de travail de professionnel de santé

L’outil de diagnostic automatique proposé en ligne par l’ASIP Santé vérifie les postes de travail des professionnels de santé pour l’ensemble des composants associés aux accès par carte à puce. En ce sens, sa portée n’est pas restreinte aux seuls accès au système DMP.

4 – Une messagerie sécurisée en 2013

Le dispositif de messagerie sécurisée proposé par l’ASIP Santé a été établi dans la concertation très en amont de la rédaction des premiers cahiers des charges. L’offre de services en cours de réalisation exclut toute contestation des choix techniques puisqu’elle repose sur les protocoles SMTP et IMAP mondialement reconnus et sur des solutions open source ; ils ont au contraire recueilli le consensus le plus large. Les échanges avec les industriels sur ce sujet comme sur le programme de travail de l’agence en général s’appuient sur une information régulière, notamment via les publications sur le site esante.gouv.fr et l’organisation périodique des « Journées Nationales des Industriels » très suivies par quelques 200 sociétés du secteur qui saluent la qualité du dialogue ainsi instauré.

 

RÉPONSE DU DIRECTEUR GÉNÉRAL DU GROUPEMENT D’INTÉRÊT ECONOMIQUE SESAM VITALE

1- La question des fonctionnalités de la carte Vitale 2 et de leur coût

La Cour évoque dans son encadré la décision des pouvoirs publics d’abandonner en 2010 la voie des certificats électroniques en carte pour sécuriser les accès aux services en ligne. Cette voie souhaitée à l’origine de Vitale 2 par les pouvoirs publics, pour sécuriser les futurs téléservices de santé, mais aussi pour les besoins de l’administration électronique (ADELE), avait justifié en particulier le choix d’une technologie carte à base de coprocesseur cryptographique.

Il est vrai qu’à l’époque, et avant lancement de l’appel d’offres cartes Vitale 2, cette option associée par ailleurs à une taille mémoire plus importante avait été évaluée par les experts à près de 70 centimes d’euros par carte.

Mais cette évaluation de l’époque est à nuancer significativement, à la lumière des évolutions technologiques et économiques depuis 2004, date des décisions structurantes sur Vitale 2 :

- Dès 2006, les résultats des appels d’offres cartes ont permis d’avoir un coût de carte vierge Vitale 2 (c'est-à-dire sans personnalisation de données) inférieur à celui d’une carte vierge Vitale 1 (elle-même sans coprocesseur cryptographique, et avec une mémoire très inférieure) dans le précédent marché.
- En 2012, le coût d’une carte vierge Vitale 2 est inférieur de 30 % à ce qu’il était en Vitale 1 dix ans plus tôt.
- Enfin, sur un plan industriel, le catalogue actuel des offres « sur étagère » pour une carte à puce à partir de 16 K de mémoire comporte maintenant en standard un coprocesseur cryptographique.

2- Le rôle du GIE SESAM-Vitale

Le GIE SESAM-Vitale est un maître d’oeuvre en liaison avec de nombreux sous-traitants ou parties prenantes sur le terrain. Dans le nouveau contexte actuel, sa responsabilité et ses missions portent aujourd’hui sur les domaines suivants :

- La carte vitale et son dispositif de bornes de mise à jour (conception technique, infrastructure d’émission et de mise à jour de cartes, gestion technique du parc de cartes).
- Le système de télétransmission de feuilles de soins, demandes de remboursement des complémentaires, et pièces justificatives depuis le poste de travail du professionnel de santé jusqu’aux « frontaux » des systèmes d’informations des organisations d’assurance maladie obligatoire et complémentaire.
- L’accompagnement des éditeurs de logiciels dans l’intégration des nouveaux services en ligne de l’assurance maladie, ainsi que la réalisation et l’administration des composants de sécurisation par carte, de l’accès au portail de l’Assurance Maladie.

Pour intervenir sur ces domaines, le GIE consolide et développe en particulier trois compétences transversales spécifiques dans le périmètre de l’Assurance Maladie :

- La « relation avec les industriels » ; celle-ci est stratégique et s’exerce vis-à-vis de plus de 150 sociétés, fournisseurs de solutions pour les professionnels de santé.
- La connaissance du « système d’information du professionnel de santé (PS) », afin d’évaluer les impacts des services de l’Assurance Maladie sur ceux-ci et d’anticiper les évolutions technologiques (mobilité, etc…).
- La sécurisation des services par carte à puce. - L’exigence de maintien en condition opérationnelle du système SESAM-Vitale et la transition vers les services en ligne.

Le rapport de la Cour rappelle que « la phase de transition (du système de télétransmission) vers la nouvelle architecture de la CNAMTS n’a pas encore été définie », et pointe un risque lié à la continuité du traitement. En complément de la question soulevée sur la cible et la feuille de route devant conduire au remplacement total de SESAM-Vitale, il nous parait utile de préciser qu’il n’y a pas d’ambiguïté pour le GIE SESAMVitale quant à l’objectif de maintien en condition du système opérationnel avec une exigence élevée de qualité de services. Dans ce cadre, et contrairement à ce que pourrait suggérer le rapport de la Cour, le GIE, à la demande de ses membres prévoit dans son plan d’actions d’assurer toutes les maintenances et évolutions nécessaires au service de télétransmission y compris, celles qui, comme les « droits en ligne » s’appuieront dès 2013 sur la nouvelle infrastructure de la CNAMTS.

 

RÉPONSE DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L’UNION NATIONALE DES RÉGIMES SPÉCIAUX

Je vous informe que le texte destiné à figurer dans le prochain rapport public annuel de la Cour des comptes n’appelle aucune réponse de ma part.

 

RÉPONSE DU PRÉSIDENT DU CENTRE TECHNIQUE DES INSTITUTIONS DE PRÉVOYANCE (CTIP)

Nous avions eu l'opportunité de nous exprimer, début novembre dernier, sur la version provisoire de ce document. Nous constatons que la version définitive que vous avez bien voulu nous communiquer, aborde les points essentiels de ce dossier. En conséquence, nous n'avons pas de remarque à formuler.

 

RÉPONSE DU PRÉSIDENT DE LA FÉDÉRATION FRANÇAISE DES SOCIÉTÉS D’ASSURANCES (FFSA)

Vous nous aviez déjà interrogés, en octobre dernier, sur ce sujet. Nous vous avions alors précisé que nous n'avions pas d'observation de fond à formuler sur le relevé d'observations provisoires de la Cour. Nous vous confirmons cette absence de remarques. Nous partageons en effet totalement les observations de la Cour qui souligne la stratégie autonome de la CNAMTS qui constitue un « recul en termes d'organisation et de gouvernance ». Comme la Cour le précise, il est regrettable que « la stratégie commune qui avait permis le succès de SESAM-Vitale et qui avait été validée par la CNAMTS et ses partenaires jusqu'en 2009 » ait été abandonnée.

 

RÉPONSE DE LA PRÉSIDENTE DU CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE DES PHARMACIENS

Je vous informe que le Conseil national de l'Ordre des pharmaciens n'a pas d'observation à porter sur ce document.

 

RÉPONSE DU PRÉSIDENT DE LA HAUTE AUTORITÉ DE SANTÉ (HAS)

La Haute Autorité de santé n’a pas de remarques sur le document qui lui a été communiqué.

197 Cour des comptes, Rapport 2008 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2008, chapitre VII, pages 223-262.

198 Cour des comptes, Rapport public annuel, février 2009, chapitre 6, pages 135-151. Un rapport non publié a formulé à la même époque des recommandations de recadrage du projet de dossier médical personnel.

199 Cour des comptes, Rapport public annuel, février 2010, chapitre 11, pages 247-275.

200 Le régime général n’a identifié aucune carte Vitale falsifiée ou frauduleusement modifiée. Il n’a pas recensé les usages frauduleux de cartes valides, qui seraient très peu nombreux. La caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés ne dispose que d’un agrégat « Usurpation droits - Usage frauduleux de carte Vitale, falsification ou fausse attestation de droits », qui recouvre un champ plus large que la seule fraude à la carte Vitale. Sans que cela soit exhaustif, seules 56 fraudes ont été dénombrées à ce titre en 2010, qui ont entraîné 21 saisines du parquet, une pénalité financière et 20 demandes de restitution de remboursements totalisant 255 668 €. Un recensement exhaustif serait utile car des problèmes de cartes Vitale en doublon ou non invalidée subsistent.

201 Source : Agence des systèmes d’information partagés de santé (ASIP Santé), octobre 2012. Les projets couvrent notamment le PACS : imagerie numérique (Picture Archiving and Communication System) ; ROR : répertoire opérationnel des ressources des hôpitaux ; le DCC : dossier communicant cancer, en cours d’intégration au DMP ; « Émergence » : pilotage, financé par l’ASIP. Le budget moyen par habitant a été de 0,80 € en 2011, en variant de 0,17 € à 3,07 € (et 18,50 € en Martinique).

202 La maîtrise d’ouvrage stratégique décide des grandes orientations à moyen et long terme (objectifs, enjeux), dans des documents orientant les choix technologiques : par exemple, mise en commun de systèmes entre régimes, champ du dossier médical personnel, création d’un téléservice, photographie sur la carte Vitale, outils prioritaires de sécurisation des données, de lutte contre la fraude, etc. Les trois équipes mentionnées ici totalisent une vingtaine d’emplois spécialisés. Elles n’exercent pas une expertise informatique, cette dernière relevant des maîtres d’ouvrage et des maîtres d’oeuvre chargés de produire les systèmes eux-mêmes.

203 Le secrétariat général des ministères sociaux a conforté, certes tardivement, sa capacité stratégique en créant fin 2011 la délégation à la stratégie des systèmes d’information de santé, dont les 15 emplois n’ont été intégralement pourvus qu’un an plus tard. Les équipes similaires de la direction générale de l’offre de soins et de la direction de la sécurité sociale ont été légèrement renforcées.

204 Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, chapitre XIII, la productivité dans les organismes de sécurité sociale du régime général. Sept. 2011, p. 381.

205 Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, chapitre XI, Les transports de patients à la charge de l’assurance maladie, Septembre 2012, p. 310 ; chapitre XVIII, Les indemnités journalières versées au titre de la malade, p. 516. Le même rapport a souligné, a contrario, les inconvénients résultant de perturbations entrainant la non-délivrance de cartes Vitale (page 211) ou de l’impossibilité de les lire (p. 334).

206 Cour des comptes, Rapport 2010 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, chapitre VI. Le système d’information de la branche maladie. Septembre 2010, p. 131.

207 Centre technique des institutions de prévoyance (CTIP), fédération française des sociétés d’assurance (FFSA), fédération des mutuelles de France (FMF) et fédération nationale de la mutualité française (FNMF). Le ministère souligne, au demeurant, que les organismes d’assurance complémentaire ainsi fédérés ont toujours été attachés à un cloisonnement entre leurs propres systèmes et celui de l’assurance maladie obligatoire : cela les a conduit en 2012, toujours selon le ministère, à traiter en télétransmission moins d’un million de demandes de remboursement électroniques (DRE) par mois à comparer aux 100 millions de feuilles de soin électroniques (FSE) mensuelles traitées par l’assurance maladie obligatoire.

208 Les organismes d’assurance maladie complémentaires mentionnent d’ores et déjà que la CNAMTS a refusé d’inclure dans les flux de données SESAM Vitale les codes adoptés par eux pour plus de précision dans la gestion des actes de prévention, des devis et des prises en charge, ce qui leur a interdit d’en dématérialiser et donc d’en optimiser la gestion.

209 Les méthodes agiles reposent sur un cycle de développement qualifié d’itératif, incrémental et adaptatif, selon douze principes communs qui tendent à satisfaire avec pragmatisme le donneur d’ordre.

210 Cour des comptes, du présent Rapport public annuel 2013, tome I-1, deuxième partie, chapitre I, Le médecin traitant et le parcours de soins coordonnés : une réforme inaboutie.

211 La commission européenne a par ailleurs adopté un plan 2010-2020 visant notamment à développer l’accès des patients à leurs données médicales et l’interopérabilité des systèmes d’information de santé. Plusieurs des opérateurs mentionnés au présent chapitre y concourent.

212 La caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés a diffusé quelques mois plus tard son propre référentiel d’interopérabilité, avec des différences qui seraient mineures mais le ministère n’a pas chargé ces deux organismes d’aboutir à un référentiel unique, bien que les deux aient été financés par la même branche maladie.

213 Un identifiant d’ouverture de session (« login ») est accompagné d’un mot de passe, ce qui permet d’identifier l’utilisateur et de sécuriser l’accès : le logiciel concerné vérifie ensuite les fonctions et données auxquelles l’utilisateur est habilité à accéder. Un code simple indique un profil de connexion donnant accès à un ensemble de fonctions, sans mot de passe individuel ni identification.

214 S’agissant d’une autre source d’économies, la dématérialisation des pièces justificatives destinées à la branche maladie, voir : Cour des comptes, Rapport 2012 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale. Septembre 2012, p. 63.

215 Voir l’encadré résumant les principales de la Cour (2008-2010), notamment les recommandations n° 1, n° 3, n° 4, n° 5, n° 8, et n° 10.

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